Roman
Elle ondoyante en robe mauve
Lui porte un petit complet gris
Tête à tête pour un front chauve
Tout au fond de la brasserie
Soleils d’écaille et d’or aux murs
Sur un fond doux de velours vert
A Sébastopol-Réaumur
On rencontre des gens divers
Peut-être ont-ils un cœur savant
Apte aux méandres de l’amour
Il lui baise les mains souvent
C’est un roman qui voit le jour
Moi j’écrivais là leur histoire :
Le petit employé discret
Qui rejoindra peut-être un soir
La fille aux longs cheveux défaits
Elle aura dit de guerre lasse
Ou les joues rouges d’un émoi
« Oui » à l’ami devant sa tasse
Et lui « Chérie rentrons chez moi »
Elle attendra sur le palier
Contre la rampe aux vieux barreaux
Il n’aura vu dans l’escalier
Que ses mollets sous son manteau
Il fouillera dans sa serrure
En piétinant son paillasson
Elle n’est plus tout à fait sûre
D’avoir envie de ce garçon
Puisqu’elle dira « oui » encore
Lorsque son corps aura gémi
On ne saurait lui donner tort
D’avoir épousé son ami
Elle ondoyait en robe mauve
Lui rajustait son complet gris
La Destinée que l’on croit sauve
Finit au fond des brasseries…
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